07/01/2017, par Jean-Claude Mulindahabi
C’est grâce à la médiation des évêques, que la majorité au pouvoir et l’opposition ont signé un accord le 31 décembre 2016, pour sortir d’une crise qui inquiétait au plus haut niveau depuis plusieurs mois en RDC (République Démocratique du Congo). Avec l’intention à peine déguisée pour briguer un troisième mandat, Joseph Kabila avait laissé planer le doute. Même si cet àccord reste dans un cadre général, et que les évêques envisagent un àccord beaucoup plus approfondi, néanmoins, une lueur d’espoir se profile à l’horizon.
L’accord signé à la Saint Sylvestre est primordial
Cet accord prévoit que Joseph Kabila quitte le pouvoir après la tenue des élections prévues fin 2017. L’opposition s’était montrée très hostile au troisième mandat présidentiel. Les tensions montaient de jour en jour. En toute évidence, au delà des manifestations, il fallait une autre puissance, pour éviter le chaos que pouvait produire le passage en force pour au delà de deux mandats présidentiels reconnus par la Constitution congolaise. Cette puissance est venue de l’église.
Comme d’autres membres du clergé, les évêques de la RDC, sont au service de Dieu, à travers l’évangélisation. Mais en plus, ils s’impliquent dans la recherche d’une solution pacifique à la crise politique que traverse le pays. Ils sont au secours d’une nation qui ne veut plus de chef d’Etat qui s’accroche au pouvoir au-delà de la légitimité. Le second mandat du président Joseph Kabila a pris fin le 19 décembre 2016. La Constitution lui interdit de se représenter, mais le président avait tenté de manœuvrer, usant de la répression pour contenir les manifestations. Il a, en outre, usé de la ruse pour diviser l’opposition et « jouer les prolongations ou temporisations» en reportant les élections à avril 2018.
Lundi 19 et mardi 20 décembre, les Congolais étaient descendus dans les rues, sous des coups de sifflets et casseroles, pour exiger le départ du président Kabila. Selon l’ONU, environs 40 personnes ont été tuées par balles, une centaine de personnes ont été gravement blessées, et plusieurs autres ont été arrêtées. Le porte-parole du gouvernement congolais Lambert Mende n’avait dressé qu’un bilan de 9 décès à cause des heurts entre policiers et forces de l’ordre.
Solidement implantée dans toutes les Provinces du pays depuis l’époque coloniale, l’Eglise Catholique de la RDC, grâce aux nombreux mouvements et associations, n’a pas seulement répondu aux besoins de la population en matière d’enseignement, de santé, de développement, mais aussi, elle a toujours été claire dans ses prises de position, et son engagement en faveur des libertés individuelles. Même à l’époque de Mobutu Sésé Séko, l’église a régulièrement pris la parole en faveur du dialogue, et la justice.
Tout n’est pas encore réglé
Les évêques s’emploient encore à persuader les derniers réticents à signer l’accord. Comme le dit “Radio France Internationale”, la médiation a pour objectif d’obtenir la plus grande inclusivité possible avant le début des discussions sur l’arrangement particulier qui doit décider du partage du pouvoir au sein de la transition et du chronogramme de mise en application de l’accord. Le Front pour le respect de la Constitution, mené par Eve Bazaiba du MLC, se dit prêt à signer l’accord, mais après négociations avec le Rassemblement.
La majorité dit avoir signé sous réserve. Le Front se voit signer « plus tard ». Après une rencontre avec les évêques, Eve Bazaiba, sa chef de file, a dit avoir senti la disponibilité de la conférence épiscopale à entendre ses préoccupations, et s’est dite prête à signer l’accord. Sous réserve d’obtenir le poste de président du comité de suivi, déjà attribué à Etienne Tshisekedi, l’opposant historique et figure du rassemblement de l’opposition.
Une délégation du Rassemblement s’est rendue au siège du MLC pour discuter avec le Front. Solution adoptée : les deux plateformes de l’opposition vont faire une proposition commune aux évêques d’arrangement particulier. Le Front dit ne s’intéresser qu’au chronogramme et surtout au comité de suivi. Eve Bazaiba aurait abordé le sujet frontalement avec Felix Tshisekedi. Comment le fils biologique ou politique, Premier ministre, pourrait être contrôlé par son père spirituel, président du comité de suivi ?
On veut tous aller aux élections, aurait répondu le fils de l’opposant historique. Voilà qui donne le ton des discussions à venir. Les évêques ont également rencontré l’ancien vice-président et aujourd’hui ministre de la Décentralisation, Azarias Ruberwa, qui lui aussi a émis des réserves pour signer. Réticent comme l’autorité morale du gouvernement, Samy Badibanga, qui selon son entourage a vu le président Kabila et les évêques.
La médiation reste optimiste et capable de répondre aux attentes pressantes des Congolais. Les évêques viennent de quitter Kinshasa pour rejoindre leurs paroisses. Les discussions sur l’arrangement particulier devraient donc entrer dans le vif dans le courant de la mi-janvier.